Publié initialement sur Linkedin
Emmanuel Macron souhaite revoir le statut d’auto-entrepreneur. Entre les procédures simplifiées d’immatriculation (l’inscription peut se faire en ligne, en quelques minutes) et des charges réduites, ce régime a tout pour séduire. Pourtant, le nombre des inscriptions est en baisse (-21 % en 2015). Et le Gouvernement ne semble pas prêt à accepter une nouvelle évolution profonde de notre conception de l’entreprise. Certains ministres, déjà, ont indiqué qu’ils ne soutiendront pas cette mesure.
Pourtant, ce statut est un atout pour dynamiser la création d’activités et faire baisser, à terme, le chômage. Pensé au départ comme un tremplin vers l’emploi, il s’est rapidement imposé comme étant l’égal d’une « vraie » entreprise. Si, au départ, il visait simplement à donner aux entrepreneurs en herbe une première expérience concrète avant de basculer vers un statut plus traditionnel, il est devenu une finalité en soi. Le principe de basculement vers une requalification en société commerciale s’opérant automatiquement à partir du chiffre d’affaire d’annuel : plus de 32.900 euros pour les activités de services et plus de 82.200 euros pour les activités libérales dans les activités de commerce. En dessous, la personne continue à bénéficier du régime de la micro-entreprise (et de ses avantages).
L’idée du Ministre Macron est d’élever ces seuils afin de renforcer l’attractivité de ce statut tout en en maintenant les avantages. Ainsi, il propose de tripler le seuil des chiffres d’affaires annuels, limitant ainsi le passage des auto-entrepreneurs en sociétés commerciales qui sont plus contraignantes.
Cette idée est séduisante car la structure du marché du travail est peu propice à la création d’emplois et tend généralement à la précarisation (disparition progressive des CDI au profit des CDD, voire des contrats d’intérim). A cela s’ajoute que l’insertion des jeunes est mauvaise : ils peinent à acquérir une première expérience, laquelle va conditionner leur recrutement. Tout aussi mauvaise que le retour sur le marché du travail des seniors.
Ce statut protégé, peu contraignant pour l’auto-entrepreneur et dont le coût pour lui est limité, permettrait de contrebalancer cette situation. Il favoriserait aussi le goût de la prise de risque, et de l’innovation : créer son activité étant à la fois plébiscité par les demandeurs d’emploi et étant aussi économiquement créateur de stabilité (l’auto-entrepreneur exerçant dans une zone réduite où il est directement en contact avec les besoins des clients et peut donc adapter en temps réel son activité à leurs attentes).
Pourtant cette réforme, si elle est validée par le Conseil des ministres puis votée, va se heurter à l’immobilisme des syndicats des artisans qui tiennent à maintenir leurs avantages corporatistes (et des prix élevés). Ils considèrent, pour justifier ce refus, que les auto-entrepreneurs constituent une « concurrence déloyale ». Cette idée n’a pas de fondement objectif puisque l’ensemble des professionnels de ce secteur est soumis aux mêmes exigences de garanties en fonction des activités exercées (niveau de formation professionnelle pour inscription dans les registres d’exercice,assurance décennale, …).
Une nouvelle fois, l’efficacité économique d’une mesure risque d’être sacrifiée au profit des accords et enjeux électoraux. Dans un pays où le taux de chômage progresse et où la croissance est nulle, il serait toutefois intéressant de rompre avec cette mauvaise habitude.
***